De la joie et de la paix

Pour les sciences cognitives, la joie est définie comme un mélange de sérotonine, noradrénalines et dopamines secrété par
le cerveau dans des situations de gratification, des états agréables pour
l’organisme entier. Par exemple, les recherches sur les deux cerveaux situent
celles que le neurologue américain Antonio Damasio appelle les émotions «
positives», c’est à dire, la joie, l’amour, la compassion et la confiance dans
une région précise, celle du lobe frontal gauche, la même qui est stimulée dans
l’état de méditation profonde. « La joie est une émotion qu’on appelle
positive, dit-il, parce qu’elle est à la source du bonheur qui est, lui, un
sentiment.i Si
la honte, la peur, la colère, la tristesse, le dégoût nous protègent en
signalant des limites à respecter et amènent comme à une fermeture, la joie, au
contraire, nous ouvre ».ii 
Quand la joie nous ouvre, par magie les yeux et la bouche s’ouvrent
aussi dans des sourires et des rires. Parfois, lorsque la peur est passée,
cette ouverture donne lieu même à des larmes de guérison, de retrouvailles avec
nous mêmes : c’est alors d’une joie physique qu’il s’agit, un courant qui nous
relie à nos viscères, notre sang, nos glandes lymphatiques. Les tests réalisés
par le docteur Damasio, par son collègue Mario Beauregardiii de
l’Université de Montréal et aussi par les autres chercheurs de l’Institut Mind
and Life aux Etats Unis sur des religieuses carmélites et sur des moines en
état de méditation sont désormais connus par le grand public. La photo du moine
Matthieu Ricard avec le crâne rempli d’électrodes pendant qu’il se prépare pour
une expérience scientifique à l’université de Wisconsiniva
fait le tour de la planète, tout comme l’article qui le définit, grâce aux
résultats exceptionnels obtenus par ce test, l’homme « le plus heureux du monde
» : sur une échelle varie de + 0.3 à -0.3 (l’état de béatitude), Matthieu
Ricard affiche un score de –0.45, complètement en dehors de l’échelle! On peut
donc conclure que le fait de méditer régulièrement augmente l’activité du
cortex préfrontal gauche, la partie antérieure du cerveau à laquelle est
associée la gestion des émotions positives, avec en plus une amélioration
prouvée du système immunitaire. Cela va peut être de soi mais, comme le dit
Damasio : « Spinoza avait raison »v lorsqu’il soutenait ce que
la neurobiologie démontre aujourd’hui scientifiquement, à savoir que
l’intellect et le corps sont définitivement reliés, et la joie et les
sentiments positifs sont favorables à la santé et au développement créatif de
notre être. De ce fait, nous avons un pouvoir unique à produire, penser et agir
sur nos émotions ; ce qui nous transforme d’un coup en maîtres de notre
existence, pourrait-on ajouter. 

 De fil en aiguille, pour recentrer la réflexion
sur l’éducation, si la région stimulée dans les états de méditation profonde
est la même où se situent les émotions positives de joie ou de compassion, on
pourrait alors se poser une question fondamentale pour tous ceux qui, comme
nous, travaillent dans l’éducation à la paix et à la non-violence : est ce que
la joie et l’attitude à la paix surgissent-elles de la même source dans l’être
? Pour René Barbier, professeur émérite de sciences de l’éducation, expert de
Krishnamurti «…le cerveau est capable de fonctionner selon un registre
différent qui permet l’accès à un autre niveau de réalité. Certains diront que
ce niveau n’existe que parce qu’il est produit par la fonction électrochimique
et neuronale du cerveau. D’autres expérimenteront personnellement cet autre
niveau de réalité et le reconnaîtront comme réel et indépendant de toute caisse
de résonance, même s’il est reconnu par une activité cérébrale. Ces derniers
accèdent alors à un sens de la profondeur au-delà de toutes techniques et,
s’ils sont éducateurs, proposent une éducation de la non-violence. »vi
Eduquer
à la paix revient à éduquer à la joie de vivre
.
Je le constate à chaque fois que, dans ma pratique d’éducation, que ce soit
dans la formation à la culture de la paix ou dans les stages d’éducation à la
joie, j’arrive à toucher la partie la plus profonde des participants, celle qui
s’apparente au domaine de l’être. Et, s’il est vrai qu’il n’y a pas de
pédagogie de l’éveil, il existe pourtant
une manière d’éduquer par laquelle nous pouvons découvrir (si nous sommes des
enfants) notre potentiel ou nous défaire (si nous sommes des adultes) de ce qui
nous sépare de notre propre trésor intérieur, de l’œuvre originale que nous
sommes venus accomplir dans cette existence.
Ainsi, on peut pousser cette
réflexion davantage en rejoignant la vision des maîtres spirituels et des
pédagogues qui ont fait l’histoire de l’éducation, pour lesquels la véritable
tâche de l’éducateur est celle d’accompagner comme un guide le disciple dans la
découverte de soi. 

Tous les éducateurs à la résolution des conflits
pourront en témoigner : il n’y a pas d’autre manière possible d’éduquer à la
paix que de contacter les individus au plus profond d’eux mêmes, de leur propre
vérité, souvent blessée ou refoulée. Car lorsqu’on se résolue à rencontrer son
propre ennemi, c’est soi-même que l’on rencontre, comme peuvent en témoigner
tous ceux qui, après des innommables souffrances subies ou infligées, ont
accepté de participer aux processus de pardon collectifs réalisés par exemple
en Afrique du Sud ou après les horreurs perpétrés dans la région des Grands
Lacs. Il s’agit d’en faire le choix : décider de ne plus souffrir est la
première étape de la transformation que le pardon peut nous apporter lorsque
nous avons été aussi blessés, pour redevenir acteurs, mais surtout auteurs de
notre propre vie. C’est un parcours de découverte de soi-même que je n’hésite
pas à définir comme essentiellement éducatif dans le vrai sens du mot, tel un
accouchement de soi au bout duquel la joie est souvent au rendez-vous. Joie et
pardon, joie et paix, joie et non-violence deviennent ainsi des binômes
inséparables. Et, comme le dit Guy Corneau, il n’est pas nécessaire de passer
par autant de souffrance pour exprimer notre partie lumineuse. 
Nous n’avons plus besoin aujourd’hui, de répéter
les erreurs des générations qui nous ont précédé en nous appliquant comme des
bons élèves à calquer un modèle qui n’a pas fonctionné, fondé sur une culture
de guerre. Si nous prenons le parti de
la joie, qui est puissance d’action, comme la définit Spinoza, nous
pouvons traverser les turbulences du changement en cours non seulement
indemnes, mais en nous transformant nous-mêmes, c’est à dire en devenant les
créateurs d’une nouvelle réalité, d’un monde nouveau.
Par exemple, si pour
certains la mixité culturelle et religieuse qui caractérise nos écoles
actuelles représente un obstacle à une certaine vision de l’enseignement (un
seul programme égal pour tous les élèves, des évaluations qui ne tiennent pas
en compte des ces différences), pour d’autres, elle devient source de richesse
inégalable. Il s’agirait ainsi de repenser l’éducation, en écoutant la
suggestion par exemple des grands penseurs contemporaines, tels Michel Serres
ou Edgar Morin qui l’a magistralement esquissé dans son récent livre Enseigner à vivre.vii Tous
deux se rejoignent dans une même proposition pour répondre de façon conséquente
à la complexité de notre société actuelle, lorsqu’ils demandent que soit établi
un socle commun de connaissances pour toutes les universités du monde.viii Ce
serait un tronc commun de savoirs inspiré par des valeurs communes à
toute l’humanité, propédeutique et obligatoire au début de tout cycle
universitaire, un « humanisme universel qui contribuerait à créer une
mondialisation pacifique» comme le disait Michel Serres. Non écoutée à ce
moment, cette proposition est d’autant plus actuelle aujourd’hui, au moment où
la parole « crise » envahit l’actualité économique. Au sujet en particulier du
dialogue entre les religions, le chemin vers la paix serait sans doute accéléré
aussi par la décision de fonder les programmes et les pratiques pédagogiques de
toutes les écoles du monde, en ne se limitant pas donc aux universités, sur des
valeurs communes à l’humanité telles que la joie, la non-violence ou la
tolérance.

Dieu, Allah, Adonaï, les dieux, le Grand Esprit
ou les Esprits, leurs émissaires et prophètes comme Jésus ou Buddha, on fondé
leur message à l’humanité sur une foi universelle alliée à la compassion entre
les êtres, au sentiment d’unité avec le cosmos, dictée par les normes de
l’amour.
Ces messages ou «révélations » contiennent parmi les réponses les plus
profondes données aux hommes pour leur conduite sur Terre, l’accomplissement de
leur destin et la construction d’une culture de la paix.

i
« L’émotion est une réaction spontanée, qui dure très peu de temps :
elle est le fait de tous les mammifères. Le sentiment s’inscrit dans la durée
et associe des représentations du néocortex, il appartient au seul monde des
humains ». In Antonio R. Damasio, L’erreur de Descartes. La raison des
émotions,
éd. Odile Jacob, 1995.
ii
Ott Hervé « Joie et humour » dans Réforme n°3137 du 21 juillet
2005.

iii
MBRL (Mind/Brain Research Lab) : http://www.mapageweb.umontreal.ca/beauregm/
le docteur Beauregard est signataire avec d’autres éminents chercheurs
du Manifeste Pour une Science sans a priori : Si les scientifiques renoncent
à la réflexion métaphysique et spirituelle, ils se couperont de la société,
disponible
à l’adresse web ci-dessus et également sur Science et Quête de Sens,
ouvrage collectif sous la direction de Jean Staune, Presses de la Renaissance,
2005.

iv
Test conduit par le Dr Richard Davidson à l’Université de Wisconsin

v
Damasio A.R., Spinoza avait raison : joie et tristesse, le cerveau
des émotions,
Odile Jacob, Paris, 2003

vi
Barbier René, « L’éducateur et le sacré» dans Journal des
chercheurs
du vendredi 18 avril 2003 : http://www.barbier- rd.nom.fr

vii
Morin Edgar, Enseigner à vivre. Manifeste pour changer l’éducation.
Actes Sud/Playbac 2014
viii
Il s’agit en ce qui concerne Michel Serres, d’un discours tenu à
l’UNESCO le 18 juin 2002, à l’occasion des rencontres du XXI siècle (reçu
directement par l’auteur, le document ne résulte pas être publié). En ce qui
concerne Edgar Morin, ladite proposition est contenue dans l’article « Repenser
le savoir pour réformer l’école » paru dans le Monde de l’éducation
360, juillet – août 2007.

Eduquer à la JOIE dans les e.Days!

Conférences, ateliers, expositions, spectacles vivants
Culture de nouveaux liens
avec Moi, l’Autre & la Nature

du 28 mai au 1er juin 2014 

à la Ferme des Noyers à Hermanville sur Mer (Calvados)

 4 journées pour réenchanter notre monde !
Day1 – Cultivons l’orientation vers la joie,
Day2 – Cultivons la conscience de l’abondance,
Day3 – Cultivons l’écologie et l’harmonie entre soi et les autres,
Day4 – Cultivons la conscience et la paix intérieure

LE PROGRAMME
Début mai, Sommet des e.Days : les WEBe.Days
Quelques soirées d’audios conférences interviews vous seront proposées pour vous inspirer à participer aux e.Days! 
             Le mercredi 28 mai à 19h30 
La soirée d’ouverture des e.Days consiste à nous brancher, à nous connecter entre nous.
Pour cela, rdv est donné à chacun à 19h30 à la ferme des Noyers pour vivre une grande soirées en lien direct avec Barbara Marx Hubbard (Santa Barbara, Californie USA).
Lydie LM, la créatrice des e.Days vous accueille.
Le jeudi 29 mai, Day 1 : LA JOIE 
La seule motivation qui puisse aujourd’hui nous faire lever le matin dans le bien être, c’est…LA JOIE!
La joie de faire ce qu’on aime faire, dans un lieu qu’on apprécie, la joie de rencontrer des personnes qu’on aime, de partager, de nous connecter avec ces personnes, la joie d’être qui nous sommes vraiment sans nous cacher derrière les masques …
Les intervenants de cette journée (entre ateliers et conférences/tables rondes) nous aideront à considérer notre motivation sous l’angle de notre JOIE, à nous connecter avec l’état, et la vibration de la joie.
12h30/ 13h45 : Repas et e.Days vidéos
15h15/18h  Antonella Verdiani et Patrick Viveret. Plaidoyer pour la joie
20h30 scène jeunes off chant,
22h Etienne Hayem et Yoni Zarka (guitare, chant, alto)
Le vendredi 30 mai, Day 2 : L’ABONDANCE l’économie
Marcelle della Faille, la marraine des e.Days et d’autres pionniers “à propos de l’argent” nous offrirons leurs visions, leurs expériences, et nous inspireront de leurs fonctionnements quand à leur rapport à ce moyen d’échange qu’est l’argent.
12h30/13h45 : Repas et e.Days vidéos
20h30  : Spectacle de et par Zaïa, « La Gueule de l’Emploi »
     Pot évolutionnaire sympathique.
Le samedi 31 mai, Day 3 : L’ECOLOGIE
Des pionniers dans deux disciplines  nous offriront leurs visions, leurs expériences, et nous inspireront de la joie qu’ils dégagent dans leurs partages.
9h30/12h30 Atelier Patrick Drouot  Ecosystème intérieur, écosystème extérieur : l’émergence des nouvelles logiques et thérapies quantiques dans le monde d’aujourd’hui.
Un exercice pratique suivra son exposé : Du cœur quantique au le cœur spirituel, l’émergence d’une nouvelle logique de pensée.
12h30/ 13h45 : Repas et e.Days vidéos
14h/15h Un spectacle équin sera proposé dans la cour de la ferme.
15h15/16h15 Liliane Gagnon Drouot Rencontre avec notre source de sagesse et de créativité dans le cercle sacré de la vie.
16h45/17h45  Luc Bigé  Relations éthiques avec la nature (nature, l’Autre et moi même) 
20h30 : Spectacle de et par Seymour Brussel, Ma Patiente a des Limites
     Pot évolutionnaire sympathique.
Le dimanche 1er juin, Day 4 : LA CONSCIENCE
La conscience est le chemin de la paix intérieure, essentiel et indispensable pour laisser émerger notre voix intérieure, notre impulsion intérieure, et laisser s’exprimer notre créativité unique!
9h30/10h45 : Danser, avec Lucille Hervieux
11h/12h30 : Conscience du corps et santé avec Seymour Brussel 
12h30/13h45 : Repas et e.Days vidéos
14h/15h30 Nicole Aknin et  Gyorgyi Szabo, en duo, Pour une spiritualité incarnée
15h45/16h45 Anne de Bethencourt et Christine Guinebretière en duo – One Life – Donner du sens à sa vie, donner du sens à La vie !
16h45 Goûter évolutionnaire sympathique

Pour une enfance heureuse

Un livre fondamental pour comprendre les mécanismes cérébraux, mais surtout pour apprendre quelles sont les conséquences de la VEO, la Violence éducative ordinaire sur les enfants et les futurs adultes…A lire et relire! 
par Catherine Gueguen, pédiatre
Des découvertes récentes sur le développement du cerveau bouleversent notre compréhension de l’enfant quant à ses besoins affectifs essentiels pour devenir 
un être humain épanoui.

Qu’est-ce qui favorise le bon développement de l’être humain ? Les progrès réalisés ces dix dernières années dans la connaissance du cerveau affectif de l’enfant sont considérables et nous permettent de mieux répondre à cette question.
Ces découvertes scientifiques vont toutes dans le même sens, modifient notre compréhension de l’enfant et nos idées préconçues sur une bonne éducation : une relation « idéale », empathique, soutenante, aimante se révèle la condition fondamentale pour permettre au cerveau d’évoluer de manière optimale pour déployer toutes ses facultés affectives (vécus et expression des émotions, sentiments, capacité relationnelle) et intellectuelles (mémoire, apprentissage, réflexion).
Durant les premières années de la vie, le cerveau est très vulnérable : les relations des parents et de l’entourage avec l’enfant ont des effets profonds sur les structures et les circuits cérébraux, sur le développement global de son cerveau, qui n’atteindra sa maturité qu’à la fin de l’adolescence. Ces relations retentiront ainsi de façon déterminante sur le comportement social et cognitif de l’enfant, notamment sa capacité à surmonter le stress, à vivre ses émotions et à exprimer son affectivité.
La particularité du cerveau de l’enfant est d’être très  malléable, (il se modifie), très immature et très vulnérable. Durant tout son parcours de vie, les premières années d’un être humain sont les années durant lesquelles son cerveau est le plus fragile.
Tout ce que va vivre l’enfant , toutes ses expériences affectives, relationnelles  vont s’imprégner au plus profond de lui, dans son cerveau, modifiant , modelant, ses neurones , ses circuits cérébraux, ses molécules cérébrales, ses structures cérébrales et même l’expression de certains gènes.
Quand l’enfant a la chance d’avoir autour de lui des adultes attentifs, bienveillants, aimants, empathiques, l’enfant va se développer au maximum de ses possibilités aussi bien au niveau intellectuel qu’affectif.
A contrario, quand l’enfant est entouré d’adultes durs, rigides, non empathiques, les conséquences se feront sentir sur sa santé physique, psychologique ( anxiété, dépression, agressivité) et sur son intellect.
Un autre point important à connaître est de savoir que le cerveau de l’enfantextrêmement immature explique que l’enfant n’est pas encore capable de faire face à ses  émotions.
Par exemple, nombre d’adultes se plaignent que leur enfant de trois ans fait des caprices, des colères, hurle,  a des cauchemars, ne veut pas dormir seul etc……. Mais c’est normal à cet âge ! La partie du cortex qui contrôle nos impulsions ne commence à mûrir qu’entre 5 et 7 ans. En dessous de 5 ans, le cerveau archaïque et émotionnel domine et l’enfant se contrôle difficilement : il tempête pour obtenir ce qu’il aime, de même qu’il est traversé par des peurs incontrôlées, de véritables angoisses et de très grands chagrins. Il ne s’agit ni de caprices, ni d’un trouble pathologique du développement mais la conséquence d’une immaturité  de son cerveau……
Nous adultes nous avons dans notre cerveau une structure très complexe, le cortex préfrontal, qui nous permet quand nous sommes envahis d’émotions désagréables, d’analyser la situation, d’y réfléchir, de prendre du recul, de réaliser que nous pouvons agir autrement.
Le cortex préfrontal chez l’enfant n’est pas du tout mature, les circuits qui relient ce cortex avec le cerveau émotionnel ne sont pas encore bien fonctionnels. Son cerveau émotionnel et archaïque sont dominants. C’est pourquoi l’enfant va réagir impulsivement soit en attaquant soit en fuyant, c’est le cerveau archaïque. L’enfant petit reçoit les émotions de plein fouet, sans filtre, sans possibilité de s’apaiser seul. Quand il est en colère, quand il est triste, angoissé, a peur, ses émotions sont extrêmement intenses, sans avoir la capacité de s’apaiser, de se consoler seul. Il ne peut pas. Quand l’entourage ne console pas l’enfant, il est en proie a des molécules de stress (cortisol, adrénaline…) très toxique pour son cerveau en développement.
Un comportement affectueux a un impact positif considérable sur la maturation des lobes frontaux de l’enfant. Il parviendra alors plus rapidement  à gérer  les émotions  envahissantes et les impulsions de son cerveau émotionnel et archaïque. Ce moment de la vie de l’enfant où il est soumis à de véritables tempêtes émotionnelles ne durera pas si les adultes apaisent l’enfant au lieu de le réprimander plus ou moins violemment, en le menaçant, en criant, en s’énervant, en punissant ou en  frappant. Chaque fois que l’adulte rassure, sécurise, console, câline l’enfant, a une attitude douce, chaleureuse, un ton de voix calme, apaisant, un regard compréhensif, il aide l’enfant à faire face à ses émotions et à ses impulsions.
Etre empathique, aimant ne veut pas dire céder à toutes ses envies, à toutes ses impulsions. Dire non, lui transmettre des valeurs, lui donner des limites passent d’abord par notre attitude. Nous sommes un modèle pour lui. Les limites seront données avec calme et douceur sans jamais lui faire peur.
La peur, le stress sont très néfaste pour son cerveau immature. La structure cérébrale qui apaise la peur n’est pas encore développée chez l’enfant. Nous adultes, avons les structures cérébrales qui nous permettent de faire face aux peurs et de pouvoir calmer notre amygdale cérébrale, centre de la peur. L’enfant lui ne peut pas calmer son amygdale cérébrale. La peur est donc très nocive durant les premières années de vie.
Le stress quand il est intense détruit des neurones dans de nombreuses parties du cerveau……Les paroles utilisant le chantage, les menaces, les paroles dévalorisantes, les gestes brusques ou brutaux : pousser l’enfant, le tirer, ou le frapper , faire peur à l’enfant en criant, faisant  les gros yeux.  Toutes ces attitudes  provoquent un stress très important très préjudiciable pour le cerveau de l’enfant. : l’enfant devient anxieux, déprimé, triste …….
Quand l’enfant est stressé son organisme sécrète de l’adrénaline, du cortisol, molécules qui en quantité modérée ne sont pas nocives mais qui  deviennent très toxiques quand leur sécrétion est fréquente et abondante. Lors de stress important, chronique  le cortisol  peut détruire les neurones dans des structures cérébrales très importantes (cortex frontal, hippocampe, amygdale, cervelet, corps calleux).
La peur empêche de penser et d’apprendre.
Apprendre est essentiel pour un enfant. Il a soif d’apprendre, de découvrir, de comprendre. Plus l’apprentissage baigne  dans une atmosphère soutenante et encourageante pour l’enfant, meilleures seront sa mémorisation et sa compréhension. Le stress qui règne dans une classe, la peur du regard des autres ou  de paraître nul devant le professeur  et les camarades de classe, peuvent sont contre performants et altèrent l’apprentissage.
Le stress subi par l’enfant quand il étudie peut diminuer le nombre de neurones dans l’hippocampe, (structure dévolue à la mémoire et à l’apprentissage) voire même les détruire.
Quand les enseignants intègrent ces connaissances sur les effets délétères du stress sur le cerveau de l’enfant, ils modifient leur manière d’enseigner et  les enfants ne subissent plus de pression inutile. L’ambiance dans la classe devient agréable aussi bien pour l’enseignant que pour les enfants. Ils sont alors disponibles pour apprendre et les résultats s’améliorent.
En effet, que se passe-t-il au niveau de l’hippocampe quand les professeurs pressurisent leurs élèves, ont des paroles négatives, blessantes, humiliantes ? : « Tu ne comprends rien, tu es vraiment nul, tu es en dessous de tout !! » Que se passe-t-il quand les parents, de même, mettent de la pression, s’énervent, crient par exemple, lors des devoirs le soir à la maison ? : «  Tu n’apprendras donc jamais rien ! Tu es un bon à rien, tu es un incapable ! Qu’est-ce-que qu’on va faire de toi plus tard ? »
Dans ces situations, les professeurs et les parents altèrent les capacités d’apprentissage, de mémorisation et de réflexion de l’enfant, à l’inverse du but recherché.
En 2012, une étude réalisée par Joan Luby, professeur de psychiatrie à l’université de Saint-Louis, montre que lorsque la mère soutient, encourage son enfant quand il est petit, son hippocampe augmente de volume.
Cette étude concerne 92 enfants et révèle  le lien entre une attitude soutenante dans la petite enfance et l’augmentation du volume de l’hippocampe entre 7 et 13 ans.
Dès que le stress est là, les circuits qui nous permettent de penser, d’apprendre, de réfléchir, de mémoriser sont perturbés voire inhibés. Plus le stress est intense, plus nous sommes dépossédés de nos facultés intellectuelles et penser clairement n’est plus possible.
C’est un cercle vicieux : quand l’enfant a peur, il apprend mal, a de mauvaises notes, est en situation d’échec. Il se sent alors nul, humilié et ne veut plus aller en classe. Les méthodes d’enseignement  bannissant totalement la peur et le stress sont beaucoup plus agréables et satisfaisantes pour le professeur mais en plus permettent aux élèves, aux  étudiants de mieux apprendre, de mieux mémoriser et d’être plus créatifs.
Le petit de l’homme a  besoin d’être entouré d’adultes empathiques qui montrent le chemin, l’élèvent dans une  ambiance chaleureuse, aimante, faite de respect et lui donnent confiance en lui-même et dans la vie.
Si dès la petite enfance, l’enfant ne rencontre sur sa route que dureté, rigidité, non respect, le développement de son cerveau  peut être  altéré, entrainant des effets  négatifs  sur ses capacités cognitives et  affectives, sur son humeur avec des manifestations anxieuses, dépressives, agressives entravant sa vie personnelle et relationnelle. La dureté physique ou psychologique durant l’enfance freine le bon développement des enfants, a des répercussions sur sa vie d’adulte en terme de santé physique et psychologique et peut laisser une empreinte sur la génération suivante.
C’est un coût très important pour la personne elle-même car elle souffre et ne s’épanouit pas  mais c’est un coût également pour toute la société qui prend en charge ses difficultés physiques et psychologiques parfois très importantes, ses difficultés d’apprentissage  et ses troubles du comportement qui peuvent conduire à des conduites d’agression, de délinquance.
Etre chaleureux avec l’enfant, lui donner confiance, l’encourager, le soutenir, avoir du respect et de la considération pour  lui n’est pas une utopie mais est au contraire tout à fait réalisable si la motivation est là.
Dr Catherine Gueguen
En savoir plus sur le dernier livre de Catherine Gueguen « Pour une enfance heureuse – Repenser l’éducation à la lumière des dernières découvertes sur le cerveau » : http://www.laffont.fr/site/pour_une_enfance_heureuse_&100&9782221140925.html